Insalubrité :La capitale poubelle

Les populations des quartiers de Yaoundé cohabitent de plus en plus avec des tas d'immondices, exposant celles-ci à de nombreuses conséquences.

Insalubrité :La capitale poubelle
Une cohabitation entre espace marchand et tas d’immondices

Par Eddy Balana

Une femme, à première vue, appartenant à la couche du troisième âge, déverse le contenu d'un sac qu'elle tient entre ses mains au sol. Sur son visage, elle manifeste des signes de dégout. Sensiblement, elle aussi ne supporte pas les odeurs pestilentielles qui se dégagent de ce tas d'immondices étalé sur plusieurs mètres. Le geste de cette dame suscite le courroux de Paul T, un chauffeur de mototaxi qui ne manque pas de le manifester.   

Sur plusieurs mètres, des ordures obstruent la chaussée. Cette ruelle secondaire qui dessert plusieurs sous-quartiers de l’arrondissement est rétrécie. La faute aux ordures qui ne cessent d’imposer leur rythme à la population environnante. Un bac à ordures est visible. Celui-ci, à moitié plein, est porté par ces ordures. 

Des ordures portent un bac

 

Une image qui suscite à la fois curiosité, stupéfaction et exaspération chez les riverains. « Les gens sont terribles ! », peste Albert N, promoteur d’un centre de santé à quelques mètres de là. Celui-ci s’insurge contre « le fait que des gens voient un bac à ordures et déversent les détritus ménagers à même le sol ». 

En face, un jeune garçon, venu lui aussi vidanger son sac à ordures se défend. « Le bac est inaccessible. Pour y arriver, il faut monter sur des ordures avec tous les risques que cela comporte. Du coup, je préfère verser où il m’est possible d’arriver ». Le garçonnet, d’une taille modeste, âgé de 10 ans trouve tout même gênant de déverser ses ordures à même le sol alors que s’y trouve un bac. 

Angèle C, restauratrice, subit de plein fouet les affres de cette poubelle qui ne cesse de s’accroitre devant ses yeux. Dépitée, elle ne sait plus à quel saint se vouer. « Je perds de plus en plus mes clients au fil des jours. Les odeurs et même la poubelle qui se rapprochent dangereusement de mon local ne les encouragent plus de venir manger chez moi ». La restauratrice, installée à quelques encablures se démerde quand elle le peut pour freiner l’avancée de cette poubelle vers son local. Peine perdu, car dit-elle : « vous faites le ménage en journée, vous rentrez, laissant les environs du restaurant propre. Le matin, ces détritus sont devant votre porte. Je suis obligé de les ramasser pour les mettre dans le bac avant de commencer la cuisine. Une tâche qui est devenue mienne depuis plusieurs mois déjà ». 

Les passages de la société nationale d’hygiène et de salubrité se font de plus en plus rares. « Je ne me souviens pas de la dernière fois que Hysacam est passé ramasser les ordures ici », lance Hervé, laveur non loin de là. Angèle C, restauratrice déplore également cette situation. « Avant, les camions d’Hysacam passait régulièrement, mais depuis peu, plus rien ». 

Comme dans ce coin, des habitants de plusieurs autres quartiers connaissent le même calvaire. Au quartier Etoudi, dans l’arrondissement de Yaoundé 1er, la cohabitation devient habituelle mais reste incommode. Chaque usager qui passe par là ne manque pas de faire des grimaces du visage pour se détourner des senteurs nauséeuses qui s’y dégagent. 

Plus loin, c’est un cour d’eau qui sert de dépotoir d’ordures. Ici, à défaut d’attendre les tours déjà épars des camions de ramassage d’ordures, ce sont les eaux de pluie qui servent de palliatif pour la vidange.